Le 09 décembre 2021 la FPMM a organisé une conférence portant sur le thème “L’impact des règlementations sur l’innovation dans le secteur des nouvelles mobilités.” Cet article est le résumé de l’une des tables rondes de cette conférence dont le thème fut “Faire rimer EDPM et sauvegarde de l’environnement ” avec la participation de :
- René-Louis Perrier, président Ecologic
- Jocelyn Loumeto, délégué général de la FPMM
- Laurent Vittecoq, associé dirigeant groupe ZOE
La réparabilité des EDPM, une préoccupation sérieuse
René-Louis Perrier
René-Louis Perrier est président d’Ecologic, un éco-organisme qui prend en charge la responsabilité des producteurs.
Ces derniers ont l’obligation de gérer la fin de vie des équipements qu’ils fabriquent. Dans ce cadre, la règle DEEE, sur les déchets d’équipements électriques et électroniques, n’est pas la seule à laquelle il faut se conformer. D’autres obligations, comme l’adhésion à une REP Emballage – concernant l’emballage des engins – s’y ajoutent.
Cela soulève un certain nombre de questionnements :
- un manque de synergie entre les différentes filières. Une des solutions pour y remédier serait de mettre en place un guichet unique pour réunir les obligations sur l’équipement électrique et l’accumulateur.
- la réglementation sur les articles de sports et de loisirs, à laquelle les engins de mobilité musculaire devront également se plier.
- une interface administrative encore complexe entre les utilisateurs et le dispositif réglementaire.
- les obligations liées à la distribution : les distributeurs sont en effet tenus de reprendre tous les produits du même type que ceux qu’ils vendent afin d’en assurer le recyclage. Cela implique de prévoir davantage de lieux de dépôt pour que les usagers puissent y laisser leur engin usagé. A cette fin, Ecologic compte développer un réseau de collecte pour permettre les bons gestes de tri.
Penser la réparabilité dès la conception
Laurent Vittecoq
Pour Laurent Vittecoq, associé dirigeant groupe ZOE, les challenges sont nombreux. L’éco participation, en premier lieu, qu’il faut déjà réussir à payer en amont, dès la mise des engins sur le marché. Les modes de conception, ensuite : pour qu’un produit soit facile à démanteler, il importe par exemple que la batterie soit facile à enlever au moment du recyclage. La réparabilité doit donc être pensée dès la fabrication, dans une logique d’éco-conception.
La réparabilité, une problématique sociétale autant qu’environnementale
Le marché des EDPM fonctionne grâce à des acheteurs qui, sans encadrement en amont, peuvent devenir pollueurs. Pour René-Louis Perrier, c’est ce paradoxe qu’il faut résoudre, en travaillant en amont, dès la conception. En clair, il faudrait tendre vers des engins “prêts-à-réparer” : cette vision rétroactive de la conception relève de la responsabilité des producteurs, et évite au consommateur de contribuer à la pollution lorsque son engin arrive en fin de vie. Cette notion de rétroactivité devient de plus en plus importante. Elle doit faire l’objet de davantage de prévention auprès des consommateurs, qui ont la main sur les solutions à mettre en œuvre pour améliorer l’impact social et environnemental des produits. Il s’agit donc d’une fonction sociétale importante qu’il faut compléter par l’aspect environnemental.
“Les produits très vertueux peuvent subir la pollution générée par d’autres, car la contribution est la même pour tous. Il faut améliorer cet aspect ! Aujourd’hui l’éco contribution ne pousse pas à fabriquer une bonne trotinette, c’est là toute la problématique du recyclage : nous devons intégrer à cette démarche la notion de réparabilité”, rappelle René-Louis Perrier. Lorsque les producteurs conçoivent des produits bien conçus, réparables, ils ne sont pas récompensés par l’éco contribution. En revanche, un produit durable, pour plusieurs raisons, coûte finalement moins cher. Un produit réparable a plus de sens pour l’environnement, et se révèle plus économique, puisque l’on paie moins d’éco-contribution !
Faire de la réparabilité un argument de vente de masse
Dans un marché en pleine explosion, nous manquons de recul pour connaître ses répercussions environnementales. Les enjeux connus actuellement concernent la batterie, inflammable, et donc problématique pour la sécurité : elle doit pouvoir être extraite de l’engin et protégée pour ne pas prendre feu. Ils concernent également l’industrie, qui doit pouvoir valoriser l’éco conception à la hausse, dans un marché où la R&D doit encore se faire entendre afin de concevoir des produits plus responsables. Dans un marché qui amène les revendeurs à payer plus cher leur matière première et son transport, et à fixer une valeur marché assez basse pour être concurrentielle, le problème reste entier : revendre une trottinette correcte à 300 euros relève de l’impossible. Par ailleurs, la fabrication locale vaut cinq fois le prix d’un produit importé d’Asie.
Autant de données auxquelles le consommateur n’est pas forcément sensible et qu’il ne comprend pas toujours, surtout lorsqu’on connaît le prix moyen des EDPM !Dans ces conditions, mettre en avant l’indice de réparabilité semble être la solution, à la fois pour les producteurs et les consommateurs. Ces derniers sont 60% à accepter de dépenser plus de 500 euros pour un usage quotidien, et 8% à dépenser plus de 700 euros pour la même raison. Responsabiliser les acheteurs, les informer plutôt que les culpabiliser, leur vendre de l’utile, du qualitatif et surtout, du réparable : telle pourrait être la voie à suivre pour un marché de l’EDPM plus vertueux.