Le 09 décembre la FPMM a organisé une conférence portant sur le thème “L’impact des règlementations sur l’innovation dans le secteur des nouvelles mobilités.” Cet article est le résumé de l’une des tables rondes de cette conférence dont le thème fut “Industrie et encadrement technique” avec la participation de :
- Emmanuel Toussaint Dauvergne, directeur général de Screlec
- Fabrice Furlan, président de la FPMM
- Dorothée Dayraut, directrice des affaires publiques chez CNPA
Faire cohabiter tous les engins sur l’espace public
Pour Fabrice Furlan, aujourd’hui, la filière se structure. Les adhérents de la FPMM sont promoteurs du sujet, le cadre favorise la montée des EDPM. Nous avons quand même un gros enjeu de pédagogie autour de la cohabitation des différents engins. Quand le vélo en free floating est arrivé à Paris, ça a été compliqué, et on vit la même chose aujourd’hui avec les trottinettes. On travaille avec les pouvoirs publics pour harmoniser les usages qui cohabitent.
Aujourd’hui, ces engins apportent une vraie utilité dans l’espace urbain, ils viennent compléter l’offre existante. Le message que l’on veut faire passer est le suivant : ouvrir le dialogue, aligner les engins au travers d’un même usage, notamment au niveau de la vitesse. On ne peut pas, par exemple, imposer des vitesses différentes sur un même lieu. Si l’on veut décongestionner les villes, les décarboner, il faut aussi favoriser les expérimentations. Les autorités publiques ont un rôle à jouer.
Dorothée Dayraut a contribué à créer l’alliance des mobilités, qui a permis de structurer une représentation des nouvelles mobilités. Elle a aussi travaillé sur la loi des nouvelles mobilités (LOM). Ce qu’elle observe, c’est que nous sommes au début de la mise en œuvre de cette loi. On ne dispose pas de tous les outils. Bien que les AOM couvrent l’ensemble du territoire, elles n’ont aucun moyen pour déployer la mise à l’échelle des micro-mobilités. Il est donc essentiel de mettre les moyens, dans les zones moins denses, pour déployer les micro-mobilités
Réglementer le marché pour mieux le structurer
Les Français ont très peu de connaissance du ZFE : 60% d’entre eux ne savent pas ce que c’est. Demain, les véhicules diesel ne pourront plus circuler en ville, et les gens ne sont pas au courant. Il nous faut donc faire de la pédagogie et leur proposer des modes alternatifs de transport au-delà du véhicule, et les accompagner dans ce changement allant d’un usage presque exclusif de l’automobile à un usage multimodal/
L’ambition serait-elle trop importante ? On sort de la période COVID, booster de communication sur les mobilités douces. Aujourd’hui, l’enjeu est d’axer la réflexion sur la régulation du marché pour que tout le monde trouve sa place. Les Français sont prêts à passer au multimodal ; un des défis est que les pouvoirs publics leur donnent les moyens de le mettre en application.
Penser le cycle de vie des engins pour assurer leur écoresponsabilité
Pour Emmanuel Toussaint Dauvergne, directeur général de Screlec, il y a un abandon de certains équipements dont il est nécessaire de penser le cycle de vie et de mort. Que devient un produit au moment où il devient un déchet, hors du contrôle de son utilisateur ? Aujourd’hui, Screlec gère la durée de vie des batteries, et assure leur recyclage en fin de vie.
On accuse aujourd’hui un train de retard, un décalage entre l’émergence massive des EDPM et des batteries qui nourrissent les engins électriques de déplacement, et la gestion de l’après-usage. Cela souligne la nécessité de fournir à chaque détenteur d’EDPM la possibilité de faire prendre en charge son engin : demain, chaque détenteur doit pouvoir avoir la capacité d’amener sa batterie, de transférer sa responsabilité quant à son recyclage, dans un organisme de proximité dédié à la fin du cycle de vie.
Faire cause commune pour se structurer par rapport à un marché qui évolue à grande vitesse
Fabrice Furlan rappelle que ces nouveaux usages, ces croissances et émergences donnent tout son sens à la nécessité de faire cause commune pour faire évoluer ces sujets dans le bon sens. Sans cause commune, il est impossible de légitimer cet engagement. De nombreux chantiers ont avancé, mais de nouveaux sont apparus et d’autres encore émergent. La cause commune est donc un prérequis essentiel : elle apporte un cadre, un arbitrage, des volontés conjointes.
Nos adhérents, industriels, et encore plus les importateurs, vivent aujourd’hui des moments difficiles en termes de structuration. Des problématiques qui ne peuvent être réglées que par la participation de tous les acteurs à une cause commune.
Un rappel hautement stratégique pour Emmanuel Toussaint Dauvergne : il faut une structure, une cohérence, pour défendre nos intérêts auprès des pouvoirs publics, sinon ça ne fonctionne pas. Aujourd’hui, la réglementation n’oblige pas de venir travailler avec la FPMM mais ce sera le cas demain. Ensemble, nous pouvons construire cette filière et défendre les intérêts de tous les acteurs.
Protéger les données des utilisateurs, un enjeu majeur pour les acteurs du marché
Le sujet très global des données entre les opérateurs B to B revient beaucoup sur la table : il faut absolument un accès non discriminé à la donnée pour tous les opérateurs. La loi LOM a posé les premiers jalons dans cette direction. Le marché se construit et il faut faire attention à l’équilibre entre les différents opérateurs. L’Europe jusqu’à présent a été un peu naïve sur la gestion des données. On est en faveur d’une structuration au niveau national puis européen, car l’Europe n’est pas encore suffisamment forte face à des acteurs tels que la Chine ou les Etats-Unis.
Un enjeu de financement
Le blocage principal est le financement, comme on a pu le constater avec le programme Avenir piloté par le CNPA. Aujourd’hui, il n’y a pas assez de bornes de recharge dans les stations services par exemple, on a un enjeu de financement avant tout. Le stationnement doit être déployé aussi d’ici 2025, cela représente 600 millions d’euros d’investissements pour répondre uniquement à une obligation de la LOM dans 4 ans ! Il faut avancer à petit pas et subventionner tous ces efforts au fur et à mesure du temps.
Le recyclage des batteries, un effort collectif pour un enjeu stratégique
Cette inquiétude reflète aussi celle liée au recyclage : il est difficile, comme le souligne Emmanuel Toussaint Dauvergne, de trouver des exutoires pour accélérer le recyclage des produits en fin de vie. Un enjeu majeur : la batterie est un déchet dangereux, dont le recyclage doit être encadré. Or la structure actuelle est encore en retard par rapport à cet enjeu.
Faire front pour accélérer et structurer le marché des EDPM
Travailler avec les pouvoirs publics
Ce qui nous manque aujourd’hui, c’est une organisation conjointe, remarque Fabrice Furlan. C’est pourquoi la FPMM va se structurer au service de cette ambition, en créant des commissions afin de renforcer le pouvoir de décision. Nous avons aujourd’hui un rôle à jouer, en tant que facilitateur et accompagnateur auprès des pouvoirs publics, afin de désengorger le secteur.
Aujourd’hui, il y a un vrai décalage entre les besoins financiers et les moyens donnés. Les acteurs industriels n’ont pas forcément les moyens d’implanter des bornes par exemple, mais il faut trouver les moyens de mettre en place ces dispositifs pour recharger les trottinettes des usagers partout. Sans ça, on ne pourra pas faire avancer le marché. On doit travailler et pousser nos autorités à avoir une gouvernance globale, harmonisée.
Adopter une vision plus globale
Pour Dorothée Dayraut, les pouvoirs publics sont assez mal organisés pour avoir une vision plus globale, plus intermodale. Ce qu’on observe dans la réglementation, c’est que les organismes n’ont pas de rôle clairement défini.
L’urgence est donc de créer des synergies entre les métiers plus traditionnels et les nouveaux acteurs : les auto-écoles deviennent des écoles de la mobilité, pour l’ensemble des engins. Les distributeurs automobiles distribuent aussi d’autres engins. Les passerelles se développent donc aussi au niveau des acteurs.
Peser sur le débat
Pour Emmanuel Toussaint Dauvergne,, il est essentiel d’avoir une posture et une volonté commune d’agir, de se coordonner, afin d’avoir voix au chapitre dans le débat sur les EDPM.
“La mobilité est un besoin primaire, et cette notion est renforcée par les micro-mobilités. Notre rôle est d’avancer plus vite, en même temps, en permettant à tout le monde de monter dans le train”. Fabrice Furlan
“La FP2M fait un gros travail de prévention et de sensibilisation sur le sujet de l’accidentologie et de la fraude, et notamment sur la circulation hors agglomération, sur toutes les cibles concernées”. Jocelyn Loumeto
“Les choses évoluent, et les sujets que nous évoquons aujourd’hui, bien qu’ils semblent peu connus, seront de plus en plus évoqués demain, au même titre que ceux concernant le port du casque à vélo” Fabrice Furlan